OSWALD BOSTON, Traces de Secret




Salut, peux tu te présenter en nous disant ce qui te semble important pour  te définir ?
Je m’appelle Oswald Boston, je suis né à Enghien-les-Bains mais toute mon enfance s’est déroulée à Epinay sur Seine dans le 93.
J’habite  actuellement à Toulouse où se trouve  mon école, les Beaux Arts de Toulouse ,dans laquelle j’ai obtenu un diplôme.
Artiste et photographe, je travaille pour d’autres artistes dans le domaine musical. Pour le moment je vends mon travail sur internet et je fais des petits boulots pour me financer.


Comment définirais tu ton activité Artsitistique ? Ça porte un nom connu ou tu lui as peut être donné un nom toi même ?
Par les questions de perception qu’elle pose à travers le jeu d’échelle, j’ai appelé ma pratique traces de secrets.  Pour donner un terme plus théorique, le nom qui lui conviendrait le mieux serait street land art car elle regroupe des caractéristiques du street art et du land art.

Comment l’idée et l’envie te sont venues ?
L’idée des traces de secrets est partie de la thématique du camouflage: être présent  sans être perceptible et sans doute inspirée, je suppose, des travaux de Georges Rousse.
Au fond, je ne sais vraiment pas comment  j’ai été amené à faire ces traces. Je me rappelle juste que je j’observais la cour de mon école et que j’ai eu envie de m’emparer de cet espace. Puis j’ai fait mon autoportrait en grand sur le sol. À vrai dire je ne me rappelle pas d’une logique me permettant d’expliquer de quelle manière j’ai pu répondre à la thématique. C’est sans doute cela que l’on appelle l’inspiration. Kandinsky dirait peut être qu’il  s’agit de l’expression d’une « nécessité intérieure »…

Depuis quand pratiques tu cela ? As-tu beaucoup de réalisations à ton actif ?
Cela fait 3 ans que je réalise les  traces de secrets  avec de longs moments de latence où je m’occupe d’autre chose.  Pour le moment, par exemple, je n’en fais pas souvent. J’en ai réalisé peu pour l’instant mais je compte en faire davantage dans des lieux différents car c’est en grande partie la variété des lieux où je réalise mes traces qui rend l’œuvre plus intéressante car il y a toujours l’idée de la faire côtoyer avec le plus grand nombre d’habitants, de personnes, de spectateurs possibles.
D’autre part, d’un point de vue visuel, il faut concevoir le dessin différemment pour chaque lieu afin qu’il y’ait  une certaine harmonie entre l’expression du visage, les traits du dessin, le moment où il est réalisé (climat, lumière) la prise de vue photographique (artistique et documentaire), l’aménagement de l’espace et l’architecture des édifices s’y trouvant, etc…

Pour tes réalisations, j’imagine que  ce n’est pas toujours évident de trouver un terrain praticable non ?
Bien qu’ayant analysé le terrain et les prises de vue possibles, pour un résultat conforme à mon plan, je ne suis jamais vraiment certain du bon déroulement  de la mise en œuvre du projet à cause du climat par exemple.


En plus des soucis climatiques, tu dois être confronté à des problèmes
« relationnels » avec le voisinage de tes réalisations ?
Effectivement, à l’exception des conditions climatiques parfois imprévisibles, il  m’est arrivé de demander l’autorisation à des structures de copropriétés incapables de donner une réponse en rejetant  la décision sur un responsable d’un grade toujours plus élevé souvent difficilement joignable, qui au final refusait. D’ailleurs, je me souviens que, ce jour là, je m’y suis quand même rendu. Le gardien, non pas contre moi, voulut me dissuader pour s’épargner les sévices hiérarchiques en mésentente à cause d’un problème interne.   
Toujours est-il que le soir, lors d’une réunion, j’ai pu réitérer ma requête auprès des habitants élus comme porte-paroles des copropriétaires. L’essentiel étant que mon projet fut enfin validé et j’ai donc pu  le réaliser !  Je n’avais pas l’habitude de demander de permission car mon travail ne dégrade pas et ne gêne pas particulièrement les habitants ; bien qu’étant d’une certaine envergure, il se veut assez discret. Par contre je ne sais pas si ma pratique est légale ou non, à part administrativement (avant réalisation). Je n’ai jamais eu de gros problèmes en grattant le sol sur des terrains vagues de quartiers plus ou moins inutilisés et  peu souvent entretenus. J’avoue que, un peu à la manière du graffiti (en général), je ne me pose pas souvent la question de la légalité du support ; je dessine ou je peux dessiner et photographier. Cela ne veut pas dire pour autant que je suis contre les autorisations.

À plusieurs reprises, j’ai pu me rendre compte que l’on fonctionne souvent selon des codes qui veulent que ce soit les titres et les statuts sociaux qui justifient nos actes et sans lesquels  nous semblons demeurés incompris. Il est certain que l’on a besoin de statuts mais je ne pense pas qu’ils doivent prévaloir sur la qualité de notre travail ou de nos actes. Et je peux dire que le statut de fou et d’artiste sont bien liés entre eux car il m’ont souvent servi à me justifier auprès de certains passants, qui se demandaient pourquoi je grattais le sol à des heures tardives, et surtout,  pourquoi je faisais un grand dessin d’une manière aussi peu courante si l’on ne me paie pas pour cela. En bref, le contact avec le spectateur ou l’habitant se fait bien avant le commencement du dessin ; l’œuvre contient donc en elle son processus et sa réalisation jusqu'à sa destination.


Lorsque tu passes à la réalisation, tu es seul ou tu as besoin d’aide, de main d’œuvre ?
Dans mes travaux, il m’arrive souvent d’avoir de l’aide de la part d’amis, pour les photos, pour mes déplacements, pour le marquage des repères,  pour gratter le sol ou me proposer des terrains, mais la majeure partie du temps, je suis seul ; je ne peux pas trop leur demander, c’est assez long et éprouvant. Avoir une équipe pour la main d’œuvre me ferait gagner beaucoup de temps c’est sûr, mais je ne compte pas trop là-dessus pour l’instant. De plus j’aime intégrer ma propre main, mon énergie physique et émotionnelle dans mes travaux plastiques car je pense que ça joue un grand rôle quant au résultat, même s’il s’agit d’une pièce très simple à réaliser pour tous.
Dans le cas des traces de secrets, il s’agit tout de même de dessins, de ce fait, chaque trait contient en lui ma gestuelle, mon interprétation du plan que j’ai fait préalablement ainsi que les idées que je trouve sur le moment.


Quels sont les types de terrains on tu interviens ? Urbains, ruraux ?  As-tu des besoins spécifiques ?
Je réalise mes travaux surtout dans les milieux urbains « in situ » avec la Nature et ses modifications, à savoir, l’espace aménagé. La raison est qu’il est difficile pour moi d’intervenir dans des lieux où l’homme n’est pas ou très peu intervenu car, en effet,  je considère que d’un point de vue sensible, la Nature est un art suprême inégalable duquel dépend directement ou indirectement la majorité de l’inspiration humaine.



C’est  la seule raison qui te pousse vers les zones urbaines?
Non en effet, j’aime que mon travail soit mis en partage et en confrontation direct avec le spectateur, quelle que soit la manière dont il le perçoit ou non.
Je suis soucieux d’offrir le maximum de contacts entre le spectateur et mes réalisations, car chacun d’eux a un rôle à jouer.  Le lieu d’exposition se confond avec le lieu où se trouve la réalisation. Ce procédé d’exposition rend les œuvres plus vivantes car, tout comme le graffiti, elles interagissent directement dans le milieu de vie. Personne n’a l’obligation de communiquer avec, c’est à dire de s’y intéresser, mais chacun doit s’y confronter ou tout au moins vivre avec, à la manière des relations humaines. En gros, je souhaite que l’œuvre vive avec son entourage.

L’inconvénient de ton Art c’est que, contrairement au graffiti qui est de plus en plus «  côté »  et qui s’installe dans les galléries ou les musées, malheureusement pour toi, ton travail n’est pas  « transportable » et donc plus difficilement partageable et dur à promouvoir ?
Mon travail ne manifeste pas de réelles contestations envers les barrières que peuvent créer certains espaces comme les galeries d’art ou les musées. Bien  au contraire, j’aime le caractère précieux ou privilégié qu’ils peuvent apporter à une œuvre d’art. Ainsi, c’est plutôt la partie photographique de mes réalisations qui a pour finalité d’être vendue ou exposée, notamment via des galeries ou internet par exemple.  Ces procédés de publication sont, de cette manière, d’autres moyens de mise en partage apportant un regard différent de spectateurs différents sur mes réalisations.

Mais pour toi quelle est l’œuvre alors ? La réalisation initiale sur les terrains ? Les clichés qui en résultent ?
Paradoxalement, le travail « in situ » est la partie la plus importante de l’œuvre car c’est elle qui entre en contact direct avec la population du lieu sur lequel elle est située, mais c’est aussi la partie la moins exploitée de par son caractère, jusqu'à présent, éphémère.
La partie photographique n’est pas que documentaire car il y a quand même une recherche sur  l’harmonie entre le dessin, sa prise de vue et sont environnement. En fait, l’œuvre, c’est tout l’ensemble  du travail car dans ma démarche, je pense aussi bien à la réalisation « in situ » qu’a ce que j’en ferai avec un appareil photo, mais j’aime à souligner l’importance primordiale de l’œuvre physique, car c’est là que tout se passe.


Ce coté éphémère, c’est une démarche volontaire? ou aimerait tu pouvoir les figer définitivement ?
Un aspect  de ces traces, c’est qu’elles se veulent simples autant dans leurs traits que dans leurs moyens de fabrication, c’est principalement cela qui les rend éphémères. Des artistes peuvent se permettre de réaliser de grands projets couteux pour s’exprimer, moi j’essaie de faire de même mais avec mes propres moyens tout en essayant de rendre cette pratique la plus indépendante financièrement possible pour qu’elle soit accessible à tous, j’aime ce que l’on peut faire de grand avec des choses simples. Ce que j’aime dans l’éphémère des traces, c’est que ça rend le travail finalement discret, comme une apparition qui se serait dévoilée un court instant avant de disparaître.

L’envie ne t’est jamais venue de réaliser la même chose, mais de pouvoir les fixer au sol plus durablement comme avec de la peinture, dans le style du graff ?
Fixer au sol ces traces serait intéressant à réaliser mais il faudrait toujours garder cette idée de discrétion malgré la grandeur.  Personnellement j’ai déjà pensé à les réaliser avec de la peinture, mais j’ai trouvé qu’il était plus judicieux de pouvoir jouer sur la simplicité de la technique.

En gros la durée de vie de tes Traces de Secrets c’est combien ?
En générales, les œuvres que je réalise ne durent pas plus de 2 semaines environs avant de se dégrader par le passage répété de piétons, de véhicules, ou d’intempéries.

Quels sont les lieux où tu es intervenu ? Les différentes villes ? Régions ? Pays ?
J’en ai fait dans quelques villes de France comme Toulouse, Marseille, Beauzelle, Saint-Arailles, Epinay sur Seine, Villetaneuse et Bezons.


Au niveau de la préparation, tes maquettes c’est plutôt  dessins ou informatique ?
J’utilise des  photos soit  en les retravaillant à l’ordinateur, soit en les redessinant à l’encre pour en sortir les traits qui m’intéressent avant de les quadriller pour pouvoir les reporter au sol et ce jusqu’à présent même si la technique n’est pas nécessairement figée.



Une petite question pour finir : je me demandais d’où viennent les visages que tu poses au sol ?
Toi même, des amis, des inconnus récupérer sur internet  … ?
Concernant les visages, c’était mon autoportrait que je faisais au départ car je travaillais en parallèle sur une série de photos de moi-même où je faisais différentes expressions, des grimaces avec des jeux de lumière.
Par la suite, j’ai commencé à faire des portraits de gens sur internet que je connaissais plus ou moins, entre autre, sur Facebook car je trouvais intéressant que mon travail soit populaire dans le sens où il se construit avec la population et qu’il soit une part de celle-ci. Cette idée m’est venue en observant les gens poser de manière volontaire dans des sites internet publiques, presque comme s’ils étaient des stars! Pour cette raison, je ne me pose donc pas la question du droit à l’image. Par ailleurs, mes portraits n’ont pas pour but d’être ressemblants. En effet, mon but est plutôt de travailler les traits, les masses d’ombres que je pourrais transposer de manière la plus harmonieuse possible, en empruntant le visage humain pour donner vie au sol et « ouvrir les yeux spirituels» du spectateur.  C’est-à-dire élargir sa notion de perception du monde sensible et sa sensibilité à travers un acte poétique qui emploie une figure qu’il reconnaît sans pour autant l’identifier.


Ok Oswald, merci de nous avoir fait partager tes Traces de Secrets et bonne continuation  


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Retrouvez les articles qui lui ont été consacrés :
*  L’inspiration d’Oswald Boston | Actualité
*  Article sur Truemiche.com